Fiche n °162 : Le Club des Policiers yiddish de Michael Chabon

Publié le par Simatural

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Résumé :
Le district de Sitka, en Alaska, est le nouvel Israël. Y vivent deux millions de Juifs parlant le yiddish. L’inspecteur Meyer Landsman, de la brigade des homicides, est chargé de faire régner la paix dans cette communauté désobéissante et encline aux mystères. Ainsi, dans un hôtel minable, Landsman découvre un junkie assassiné qui s’avère être le fils du plus puissant rabbin de Sitka, le chef des verbovers, des Juifs ultra-orthodoxes. Des ordres venant de l’étranger exigent la clôture de l’enquête mais Landsman s’obstine : ce mort lui plaît et il refuse de laisser son assassinat impuni… Le rabbin aurait-il commandité le meurtre de son fils ? Dans quel but ? Et quels liens entretient la communauté verbover avec d’étranges commandos parlant hébreu ?

Dans une tradition typiquement américaine, Michael Chabon emprunte à tous les genres avec allégresse : légendes des émigrés juifs d’Europe de l’Est, roman noir, roman d’anticipation, critique politique de l’après - 11 Septembre et réflexion morale sur les dérives religieuses. Hommage à Chandler et à Charyn, Le Club des policiers yiddish, lauréat du prix Hugo 2008 va être adapté au cinéma par les frères Coen (The Big Lebowski, Fargo, No Country for Old Men...) et a reçu un accueil enthousiaste aux États-Unis : " Une réussite, comme si Raymond Chandler et Philip K. Dick avaient fumé un joint en compagnie d’Isaac Bashevis Singer… " New York Review of Books.
Informations complémentaires :
http://www.critic.fr/detail_livre.php?livre=31471

Mon avis :
De Michael Chabon, je n'ai lu que Les Extraordinaires Aventures de Kavalier & Clay, un roman qui a remporté le tant convoité prix Pullitzer et dont je garde un excellent souvenir. Le Club des Policiers Yiddish a quant à lui gagné les Prix Hugo, Nebula & Locus, soit trois des plus grands prix que peut espérer glaner une oeuvre de science-fiction. Pas mal non ?

Pour un prix Hugo, j'ai d'abord été un peu déçu par la faiblesse du côté "science-fiction". De fait, hormis la base du roman qui tient sur une légère dystopie (l'état d'Israël n'existe pas), on tient entre les mains un polar ... tout ce qu'il y a de plus NON-CONVENTIONNEL.

Après la seconde guerre mondiale, les juifs ont trouvé refuge dans le district de Sitka en Alaska. Mais l'état ne leur appartient pas ; il s'agit juste d'une concession de soixante ans. Et ce prêt arrive bientôt à terme. Dans deux petits mois en fait. Difficile de conserver longtemps en tête sa première impression de déception avec Michael Chabon aux commandes. Car, oui la SF n'est pas dominante mais Le Club des Policiers yiddish s'avère être un polar de tout premier plan, un roman inclassable qui transcende les genres et les stéréotypes avec talent et humour.

Hommage à des maîtres du polar comme Chandler ou encore Hammett, le Club des Policiers Yidddish a pour héro Meyer, un flic solitaire et têtu, deux qualités qui lui permettent d'être performant dans son travail. Un travail qu'il devra lâcher dans deux mois. Meyer n'a pas trop le moral et on le comprends. Du côté de sa vie personelle, rien de bien réjouissant non plus. Séparé de sa femme, Meyer plonge lentement mais sûrement dans une dépression qu'il soigne à grands coups de whisky. Il ne reste guère plus que Berko, son coéquipier pour supporter ses sauts d'humeurs. Mais voilà qu'un meurtre va le sortir de sa torpeur.

Un jour, alors qu'une gueule de bois lui martèle encore le crâne, Meyer va trouver un cadavre en bas de chez lui. Un cadavre qui va vite devenir pour lui une véritable obsession et qui l'amènera à déterrer bien d'autres secrets, qu'ils soient fait de chair ou non.

Les apparences et les stéréotypes ont la vie dure sous la plume de Chabon. Des personnages inoubliables, des situations complètement loufoques, des retournements délirants, la présence d'un argo yiddish qui, loin d'handicaper la lecture du roman participe pour beaucoup à l'ambiance décalée, achèveront de vous convaincre que le dernier-né de Chabon n'est décidément pas un roman comme les autres. Les descriptions, chirurgicales et minitieuses, ne  cache pas une critique sociale acerbe et une mélancolie transmissible mais contrebalancée par un humour décapant.  Bref, la seconde impression, celle d'être en train de lire un grand roman, celle que l'on a encore à la bouche lorsque l'on tourne la dernière page, est finalement celle qu'il faut retenir.
Les premières impressions sont faites pour être démenties, les stéréotypes aussi.

9/10 Généralement, le prix Hugo touche juste. Cette cuvée 2008 a couronné un ouvrage bien moins "SF" que ceux dont on a l'habitude. Passé cette petite déception, ce polar légèrement uchonique, cette satyre sociale totalement décapante témoigne du talent "à tout faire" d'un auteur qui n'a pas fini de nous étonner. L'incontournable de ce début d'année !

Simatural

Publié dans Critiques SF

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